Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

25 septembre 2016

A veinte años, Luz - Elsa Osorio (Luz ou le temps sauvage)

Elsa Osorio, A los veinte anos Luz, Argentine, dictature

A veinte años, Luz - Elsa Osorio
Editions Siruela Nuevos Tiempos, 2008, 382 pages.

En 1998, Luz a 22 ans et une longue histoire à raconter. Elle est Argentine et vient d’arriver à Madrid avec son mari et leur fils d’un an et demi, pour faire la connaissance de Carlos qui, lui, n’est au courant de rien. Enfin arrivée au bout d’une longue quête, il lui suffit de quelques mots par téléphone pour réussir à le convaincre qu’ils doivent se rencontrer. Elle veut lui parler de Liliana, cette femme disparue qu’il avait aimée plus de 20 ans auparavant dans l’Argentine de la dictature militaire.

C’est la naissance de son fils Juan qui a fini de convaincre Luz de la pertinence de toutes ces questions qui lui étaient venues au fil de son enfance et de son adolescence, sur son histoire, sa famille... Elevée par des parents et grands-parents militaires hauts placés, tout la porte finalement à croire qu’elle serait plutôt fille de prisonniers révolutionnaires disparus lors de la dictature. Car pendant ce « temps sauvage » où chaque parole prononcée est épiée et leurs auteurs emprisonnés si ça ne convient pas, c’est environ 500 enfants de prisonnières enceintes qui sont, à la naissance, volés pour être adoptés par des couples « bien pensants ».

Le livre d’Elsa Osorio a une construction narrative parfaite. Tout d’abord, le prologue plante l’histoire de manière assez claire, le lecteur comprend tout de suite qu’il s’agit de la rencontre entre une fille et son père qui ne se connaissent pas. Ensuite, le récit que Luz fait de leur histoire à son père comprend trois chapitres qui correspondent à trois périodes différentes : 1976 sa naissance nébuleuse, 1984 autour d’un événement marquant alors qu’elle n’a que 8 ans, et la fin des années 1990 où elle se lance finalement dans ses recherches.

Les réactions du père et de la fille lors de leur première rencontre dans un café madrilène sont entrecoupées d’un long récit polyphonique où s’expriment tous les protagonistes impliqués dans cette histoire. C’est par le point de vue de plusieurs personnes qui ont côtoyé Luz dans son enfance que nous avançons petit à petit dans une histoire aussi fascinante qu’effrayante. Car là aussi Elsa Osorio maîtrise parfaitement l’art de mener son récit en nous dévoilant les choses au fur et à mesure, dans un rythme impeccable. Cela nous procure sans cesse et le plaisir de la découverte et cet intérêt pour connaître le fin mot de l’histoire sans que jamais le rythme ne s’essouffle.

Pour ma part, j’ai aussi réalisé tout ce que cette Histoire pouvait laisser comme trace aujourd’hui. J’avais bien dans la tête les grands-mères de la Plaza de Mayo qui cherchent leurs petits-enfants disparus, mais je n’avais pas vraiment envisagé le point de vue inverse et que ces petits-enfants vivent aujourd’hui, porteurs de cette histoire toute proche... Quarante ans c’est rien, et ces enfants, parents ou grands-parents d’alors sont tous là encore aujourd’hui avec chacun leur histoire dont on voit dans ce puissant récit qu’il en faut peu pour que jamais ne puisse se faire la lumière (luz en espagnol) sur une histoire individuelle.

Un seul petit regret pinailleur, c’est qu’on aurait aimé un peu plus de style parfois, car finalement, c’est l’histoire qui prime (et effectivement elle le mérite!). Mais pour ma part, c’est en commençant un autre livre sur le même thème (Tantos héroes, de Laura Restrepo) que je me dis que j’aurais aimé un brin de relief à l’écriture. Mais ce n’était sans doute pas l'objectif de celui-ci. Il faudra que je lise un autre livre d’Elsa Osorio. Car quoi qu’il en soit, ce livre nous emporte dans cette double histoire, celle de Luz et de l’Argentine, et il nous en donne une vision percutante et touchante.

Ce livre est lu dans le cadre du Challenge Amérique Latine pour : l’Argentine.
Et pour ce qui est de mes objectifs en plus :
Lu en V.O. check.jpg
Auteur femme check.jpg

Challenge, Amérique Latine, Argentine, Osorio, dictature

P'tit bonus : mon petit conseil de film argentin sur le même thème La Historia Oficial (L’Histoire Officielle), de Luiz Puenzo datant en 1986. Il relate une histoire sur le même thème, mais là, c’est une mère, professeur d’histoire, mariée à un militaire pendant la dictature et qui ont adopté une petite fille (adorable!), qui réalise petit à petit à quel point elle est ignorante de ce qui se passe dans son pays, si proche d’elle. Ce film est d’une tension dramatique époustouflante.

PS : bon j'ai pas l'habitude de poster des messages si sérieux.. Même pas une petite touche d'humour ou de couleur.. Diantre ! Va falloir que ça change.

28 mai 2016

Lancement du Challenge Amérique Latine

Alors alors... Il fallait bien ça pour réactiver officiellement ce petit blog endormi...
Un Challenge Amérique Latine, bien sûr!!

Amérique Latine, Leonardo Padura, Cuba, espagnol, lectures, challenge

Avec A Girl from Earth et Cryssilda, nous nous lançons dans un challenge qui va nous tenir longtemps et nous ravir tout autant. Le but étant de lire un livre de chaque pays de l'Amérique latine, et d'en faire le commentaire sur nos blogs ou pages Facebook respectives. Le premier challenge dans cette histoire a été de se mettre d'accord sur les pays qui composeront "notre" Amérique Latine. Et dans notre enthousiasme explosif, autour de superbes cocktails et de savoureuses acras et autres délices, nous avons choisi une Amérique latine élargie, nous comptons donc 28 pays ou territoires latino-américains!!

Dans la mesure du possible, l'idée est aussi de découvrir des auteurs. Donc on ne choisit pas des auteurs qu'on a déjà lus. 28 auteurs latino-américains à découvrir, ça fait rêver, n'est-ce pas ?

D'autre part, nous n'avons pas de limite dans le temps, mais nous avons une super carotte, hihi. Une fois que chacune de nous trois aura lu un livre du même pays, hop! la récompense est un repas dans un restaurant dudit pays ! Ça donne envie, hein ? Nous allons sûrement devoir un peu nous creuser la tête, car VRAIMENT PAS SÛR que nous trouvions un restaurant du Salvador ou du Honduras. Mais c'est un challenge, oui ou non ??? Alors nous allons rivaliser d'astuces et d'ingéniosité pour remplir aussi cette part du challenge... (je sens que je vais partir à la recherche de livres de cuisine...)

Amérique Latine, Caraïbes, Cuba, espagnol, lecture, culture, saveurs, mojito, cuisine

De mon côté, j'ai eu envie d'ajouter encore quelques petites complications (pourquoi faire simple quand etc.). Dans la mesure du possible, je vais essayer de lire en V.O. (youpi doo dee, youpi doo daa!) et de lire des auteurs femmes. Ben oui hein, c'est mon côté féministe, na! Quand on se lance dans un tel parcours, autant le faire vraiment comme on le souhaite. Bien sûr, je n'ai pas envie non plus de lire des auteurEs juste pour ce E, donc ce n'est pas une règle que je m'impose, c'est juste une attention particulière que je souhaite avoir pour mes choix de lectures. D'ailleurs : je suis preneuse de conseils !! Si vous avez en tête une auteurE que je ne dois pas rater, faites-le moi savoir :) Et de toute façon, le point super chouette (et qui fait que ça pourrait se poursuivre jusqu'au bout des temps), c'est que nous avons la possibilité d'ajouter des "bis". Non pas UN bis, mais AUTANT DE bis QU'ON LE VEUT après tout. Un livre ne nous a pas tellement plu ? Ou au contraire, nous découvrons un auteur qui pof! en quelques pages devient un "chouchou" ? Ou un livre nous fait sentir qu'il y a tellement de choses d'un pays qu'on voudrait encore découvrir ? Ou bien nous avons dans notre bibliothèque 2 ou 3 livres du même pays et vraiment, non, impossible d'en écarter un ? Eh bien, libre à nous d'ajouter des "bis" = de lire plusieurs livres pour un même pays. Youhouuu!!

Bon.. et dans ma folie toute personnelle, je rêverais d'ajouter aussi aux différents pays : un film, une chanson, une sortie au théâtre, un peintre, etc.... mais bon.. Pour ça, on verra!!! :D

Sinon, je voulais préciser que nous avons ici une très belle coïncidence. En effet, j'inaugure aujourd'hui ce Challenge Amérique Latine au beau milieu de la 3è Semaine de l'Amérique Latine et des Caraïbes !!!

Amérique Latine, Caraïbes, Cuba, espagnol, lecture, culture

Vous pouvez retrouver sur ce site le programme complet de toutes les manifestations en France et au-delà qui ont lieu entre le 24 mai et le 5 juin 2016. De manière assez étonnante ils n'ont pas l'air d'avoir répertorié le fameux Challenge Amérique Latine, mais nul doute que cela sera réparé très rapidement étant donné l'importance de l'événement, la motivation à toute épreuve des trois participantes et le rayonnement interplanétaire que tout cela promet d'avoir.

Enfin, la dernière information, last but not least comme diraient certains, c'est que chacun peut participer à son niveau au Challenge Amérique Latine, en lisant un livre ou plusieurs, d'un ou plusieurs des 28 pays. N'hésitez pas à vous joindre à nous en toute liberté, et à nous signaler vos articles. Car plus on est de fous et plus on lit!!

Lire, lecteurs, lecture, amérique latine, foulecteurs.jpg

Voici maintenant la liste des 28 pays et territoires qui composent ce Challenge Amérique Latine, et mes prévisions de lecture. En gris tant que c'est de la prévision (pô fôcile...), en gras une fois que ce sera lu (pô plus facile, mdr!) ET avec le lien vers la note quand le livre sera chroniqué (hum, vraiment pô plus facile... :D).

Aussi, le pays en vert, le livre est lu en remplissant toutes les contraintes, le pays est en rose, les suggestions sont les bienvenues car je n'ai pas trouvé d'auteurE à lire pour l'instant.

  • Argentine : A veinte años, Luz de Elsa Osorio / (en bis : Op Oloop, de Juan Filloy)
  • Bolivie : Nuestro mundo muerto de Liliana Colanzi
  • Brésil : En exil de Elisa Lispector / (en bis : 100 mensonges pour de vrai de Helena Parente Cunha)
  • Chili : El sistema del tacto, de Alejandra Costamagna / (en bis car déjà lues : La Novena de Marcela Serrano & Del amor y sombra, de Isabel Allende / Psicomagia, de Alejandro Jorodowski / Le Reste est silence de Carla Guelfenbein ?)
  • Colombie : Tantos héroes, de Laura Restrepo / (en bis : Ayer terminará mañana, de Santiago José Sepúlveda Montenegro / El ruido de las cosas al caer, de Juan Gabriel Vásquez)
  • Costa Rica : Yo, bruja, de Isidora Chacón / (en bis ? Roxana Pinto ? Yolanda Oreamudo ? Mourons (ensemble), Federico de Joaquín Gutiérrez)
  • Cuba : Tu, la oscurida, de Mayra Montero / (en bis : El hombre que amaba a los perros, de Leonardo Padura / 
  • Équateur : Las Estrellas de la Amazonía, de Olivia Casares Zurita (en bis : Naufragée des Amazones, de Jean Godin des Odonais)
  • Guatemala : La Tour de Londres n'est pas Big Ben de Eugenia Gallado / (en bis : Moi,  Rigoberta Menchu, de Rigoberta Menchu)
  • Haïti : ?
  • Honduras : ?
  • Mexique : El huésped, de Guadalupe Nettel / (en bis : Le Cornet acoustique, de Leonora Carrington / Isla de Bobos, de Ana García Bergua)
  • Nicaragua : ? (en bis car déjà lue : El país de las mujeres, de Gioconda Belli
  • Panama : Tocino del cielo de Rosa María Britton
  • Paraguay : ?
  • Pérou : Ximena de dos caminos, de Laura Riesco
  • République dominicaine : En el tiempo de las Mariposas de Julia Alvarez
  • Salvador : ? (en bis : Horacio Castellanos Moya ?)
  • Uruguay : Intramuros de Silvia Larrañaga / (en bis : Dibujos invisibles, de Troche + Scipion de Pablo Casacuberta)
  • Venezuela : Lluvia, de Victoria De Stefano
Territoires et pays parfois associés à l'Amérique latine :
  • Belize : ?
  • Guyane : ?
  • Guadeloupe : Moi, Tituba sorcière de Maryse Condé
  • Martinique : Relato de ceniza, de Maryse Renaud
  • Porto Rico : Fe en disfraz, de Mayra Santos-Febres
  • Saint-Barthélemy : ?
  • Saint-Martin : ?
  • Saint-Pierre-et-Miquelon : ?

Et j'ai un petit bonus, car j'ai chez moi le livre Voyage au cœur des femmes latino-américaines qui comprend 18 nouvelles de 18 auteurEs de 18 pays d'Amérique latine (sans Haïti ni le Brésil) choisies et traduites par Agnès Poirier. Mouahahahahahahah!!!!

Petite mention du Prix Sor Juana Inés de la Cruz qui récompense l'excellence du travail littéraire de femmes qui écrivent en langue espagnole. Les prix littéraires sont tellement trop souvent "dominés" par des hommes que celui-ci est indispensable. Et il peut donner quelques idées : https://es.wikipedia.org/wiki/Premio_Sor_Juana_In%C3%A9s_...

Bon, et sinon, une dernière petite précision pour vous donner une idée complète de l'ampleur du challenge pour moi... Car autant A Girl que Cryssi sont des férues de billets de lecture, jetez juste un œil à leur blog et vous aurez compris. Mais moi... Moi ? Nous sommes d'accord : j'adoOore lire. Nous sommes d'accord : j'adoOore écrire. Mais... Mais il faut le dire : je dé-teste écrire sur ce que je lis. Donc, va falloir se les retrousser, les manches de l'Amérique Latine!!! Ah, mais qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour un bon resto...

separateur_semAmLat.jpgseparateur_semAmLat.jpg

26 janvier 2016

L'heure du retour

Alors ayé, c'est l'heure du retour. Retour de qui retour de quoi, on n'sait pô trop, mais c'est l'heure du retour, c'est déjà ça. L'écriture me manque, c'est une raison suffisante, n'est-ce pas ? Nan, pas sûr. Avoir envie d'écrire c'est le premier pas, mais encore faut-il avoir quelque chose à écrire. C'est là où le bât blesse. Et cette phrase est belle. Courte, ondulante, six mots pour six syllabes, trois accents et même une apostrophe, c'est pas mal ;-)

C'est donc une tentative de retour aux mots, au jeu avec eux. Je me souviens d'un de mes premiers posts il y a bien longtemps, où j'avais créé ce blog, mais je ne savais déjà pas quoi écrire à l'époque mais l'envie était là. J'avais écrit toute une note sur cette ambivalence entre le fait de dire ou ne rien dire, d'avoir envie d'écrire mais ne pas savoir quoi dire, et finalement j'en arrivais à vouloir torturmuter mon blog. Ah oui, l'intérêt de l'écriture c'est aussi de prendre des libertés. Inventer des mots, c'est un des plus grands kiffs existants. Torturmuter me plaît, je m'en souviens encore. En effet, il avait son utilité, il réussissait à dire ce qu'aucun autre mot n'aurait pu, ou alors de manière super lourde, en collant des petits et des grands mots, bref, chiant. Alors que torturmuter, c'est clair. N'est-ce pas ?  o_O'

Ce que j'aime dans l'écriture, ce sont les sonorités. C'est ça qui prime pour moi. Et le fait que les mots et les phrases doivent couler, sans heurt, sans aspérité, avec un rythme qui se sente à la lecture à haute voix ou à haut cerveau. J'aime écrire et relire, réécrire et relire encore, répéter pour écouter et sentir l'effet des sonorités. "Répéter pour écouter et sentir l'effet des sonorités", voilà, pour moi, écrire, c'est ça.

En fait, Facebook a tué mon écriture. Ouïtch, atención, c'est la séquence euuh dramatique! ^_^'  Ecrire ici était un moyen de me mettre en contact avec le monde. L'apparition de la Face de bouc a écrasé cette petite fonction que je voyais en ce blog. J'ai résisté : nanan pas la Face du bouc, j'veux pô, chuis une rebelle, j'aime pô les trucs où tout le monde va, les choses que tout le monde fait. Et puis, et puis, bien sûr, bah j'ai fini par y aller. C'est quand même agréable de voir le monde. Et alors les choses vous arrivent tellement facilement, tout le temps, c'est une masse de choses qui bougent, qui arrivent, qui passent. Mais ça bouge trop! Comment prendre le temps de se poser pour écrire, pour faire "euh au fait, euh Toc Toc, regardez, je vais dire un truc, un truc un peu construit, un truc euhhhh" et fouitt', tout a déjà tourné trois fois, blague-vidéoté six fois, pleurémotionné douze, bref, ça ne va pas avec le réseau social. Le blog oui, la Face non. C'est là que ça a tué......

Et bon, quelques années ont passé, et finalement, le-dit réseau social, on peut s'en lasser aussi. Ou pas vraiment car il y a toujours quelque chose à y fureter, finalement on se laisse bercer devant la Face comme devant la télé. On est passif sauf qu'on fait dérouler la page et qu'on clique de temps à autre. Parfois, heureusement, un ami (avec un peu de chance c'est un vrai) poste un truc rigolo, ou triste, ou beau. Même parfois ça peut être soi. Sissi. Mais sinon, non, la Face n'est pas le lieu de l'écriture. Twitter serait plus dans cette optique : comment écrire quelque chose avec cette contrainte des 140 caractères, blabla. Mais, contrairement au Pivot, je n'ai jamais réussi à m'y mettre. Pour le coup, le Gazouillis remue 1.000 fois plus vite encore que la Face. C'est comme de l'athlétisme de la réplique, et c'est beaucoup, mais beaucoup trop pour moi. Le blog est stable, pas trop rapide, il peut être à notre image (ouais, ouais, on parle de la mienne, ouais ççc'est bon!!), l'intrusion des gens est limitée (enfin sur le mien en tout cas :D) (et depuis 5 ans surtout :D) (enfin nan, elle a toujours été très limitée :D), et ça me va. (purée on dirait que je me suis fait tirer les traits, j'ai l'air un peu bleu-vert-figé nan ? :D)

Enfin, voici donc le pourquoi du comment de l'heure du retour. Retour de qui retour de quoi, on n'sait pô trop, mais c'est l'heure du retour, c'est déjà ça. Et... Et c'est now!

08:39 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (3)

15 juin 2011

La fin du mois cubain ? / Une nouvelle forme de liberté à Cuba : les blogs

C'est aujourd'hui que s'achève Le Mois Cubain, qui aura duré du 15 mai au 15 juin 2011, sur les blogs, organisé par Cryssilda et moi-même.

le mois cubain, littérature cubaine, cuba

Pour ma part, c'est la première fois que j'organisais un tel événement et ce fut un vrai bonheur. C'est sûr que la thématique m'est chère et que l'enthousiasme est d'autant plus présent! C'est pourtant un vrai défi que de rester à fond dans une thématique pendant tout un mois, et j'ai bien senti un certain relâchement dans la 2ème quinzaine, mais ce n'est pas parce que je serais arrivée au bout de la chose, ah ça non! Il m'en reste encore tellement à découvrir...

le mois cubain, littérature cubaine, cuba

Pour terminer ce Mois Cubain, je voulais vous parler d'une nouvelle forme d'expression qui naît à Cuba, et qui a son importance, je veux parler des espaces de parole et d'expression que sont les Blogs (las bitácoras!). Le gouvernement cubain a beau interdire l'accès à Internet aux particuliers, certains ont la chance d'y avoir un certain accès grâce à leur travail, d'autres se connectent à partir des hôtels pour les étrangers (une connection qui coûte cher!), et donc de plus en plus de Cubains bravent leur peur, tentent de ne pas faire cas des intimidations et osent s'octroyer un espace de liberté propre : una bitácora.

Il existe une plateforme qui héberge des blogs cubains qui sont tenus depuis l'intérieur de l'île, c'est Voces Cubanas (Voix Cubaines). Pour les non-hispanophones, il existe un système sur le blog Hemos Oído (nous avons entendu) qui permet que des bénévoles traduisent les posts des blogueurs en différentes langues. Cela fonctionne assez bien, la qualité n'est pas toujours top, mais ça permet de donner un aperçu.

Translate Cuban Bloggers, le mois cubain

La blogueuse cubaine la plus connue est certainement Yoani Sánchez avec son blog Generación Y. Elle le tient depuis avril 2007. blog cubain, bitacora, mois cubain, yoani sanchezComme elle l'explique dans sa présentation, en mai 2008 le gouvernement cubain a installé un filtre sur le toile qui fait que personne à Cuba ne peut avoir accès à son blog. Elle doit donc compter sur des amis hors Cuba pour republier ses posts dans d'autres endroits du web. Elle peut d'ailleurs compter sur de nombreux fidèles bénévoles qui lui traduisent ses textes en une quinzaine de langues (vous verrez ça dans la partie tout en haut de son blog). Yoani Sánchez tweete plusieurs fois par jours, selon l'actualité à Cuba (elle compte plus de 930,000 followers!). Et ici, elle donne des conseils aux lecteurs étrangers qui veulent aider d'une manière ou d'une autre les blogueurs cubains et qui écrivent depuis Cuba. Ce n'est pas traduit, mais elle dit que malgré une suspition de capitaliste, elle met quand même un lien PayPal... blog cubain, bitacora, mois cubain, Claudia Cadelopour les personnes qui voudraient faire un don (1h de connexion à internet coûte entre 7 et 9 dolar), mais elle conseille aussi partager les blogs cubains, de faire circuler les articles pour qu'il y ait une vraie visibilité dans le monde, d'aider à publier les articles pour nous à qui Internet ne coûte presque rien (en s'engageant à ne rien toucher aux textes, bien sûr), un tweet = un sms, c'est aussi de l'argent ou du temps de connexion... etc.

J'aime beaucoup également le blog de Claudia Cadelo qui s'intitule Octavo Cero...

A part les blogs, il existe également des espaces qui se créent pour donner la parole aux citoyens sans que ce soit une parole contrôlée, ou qui doive s'auto-censurer. Il s'agit de vidéos qui ressemblent à des émissions de télévision, mais qui sont diffusées sur Internet uniquement. Ces émissions sont tournées chez les uns ou chez les autres, avec les moyens du bord, et boudiou, quelle qualité! C'est uniquement en espagnol, mais je vais dire tant mieux pour ceux qui le comprendront et tant pis pour les autres car je n'ai pas le temps de créer des sous-titres, même si ça serait effectivement TRES intéressant de pouvoir le faire, cela pourrait se diffuser davantage encore... Voici l'émission Razones Ciudadanas n°5, émission qui était justement consacrée à la blogosphère alternative, aux blogueurs dissidents. Le modérateur Reinaldo Escobar donne la parole sur le "plateau" à Claudia Cadelo, Yoani Sánchez, Orlando Luís Pardo, Luis Felipe Rojas, ainsi qu'à une quinzaine de blogueurs interviewés dans d'autres lieux.. Et c'est une merveille !

Je ne peux m'empêcher de penser à Reinaldo Arenas... Que penserait-il s'il voyait ces blogueurs depuis Cuba malgré les difficultés, qui un peu comme lui, ont peur (ou pas, car certains ont décidé de ne pas avoir peur!), mais écrivent. Aurait-il tenu un blog dans cette situation ? Je ne peux m'empêcher de penser à Reinaldo Arenas...

En tout cas, c'est passionnant de suivre tout ce qui se passe là-bas... Et bien sûr, je ne peux pas oublier de mentionner toute la communauté cubaine de Miami, du reste des Etats-Unis et même du monde, très présente sur Internet, souvent assez radicale, et qui font énormément circuler l'information de ce qui se passe à Cuba. Je pense à Martí Noticias (avec radio et TV), Misceláneas de Cuba depuis la Suède, Prensa Cubana, blogs de Cuba... Et ici un petit exemple d'humour noir ou jaune qui circule en exil! 

J'en reviens à notre mois cubain qui s'achève et je remercie Ze Cryssilda, et tous ceux qui ont participé à ce mois de découvertes cubaines. Je vais compiler prochainement toutes les participations et j'en ferai un post à part qui récapitulera tout.

Mais pour l'instant, je vous donne une dernière information ! Nous avons une lecture commune du livre Paradiso de José Lezama Lima qui s'achèvera le 15 juillet le 30 septembre 2011. Il est encore temps de vous inscrire !!! C'est LE livre cubain auquel tous les auteurs/cinéastes cubains font référence au moins une fois dans leur oeuvre (ben euh j'exagère à peine, hein!). Et je suis sûre que lire Paradiso, c'est une réelle aventure !

Paradiso-LezamaLima.gif

Merci encore à tous, et sachez que pour ma part je ne laisse pas la culture cubaine en ce 15 juin 2011, car j'ai trop de livres que je n'ai pas lus, trop de films que je n'ai pas vus, trop de blogs et d'infos que je n'ai pas eues ! Je réfléchis encore à refaire un mois cubain l'an prochain ou à déclarer que le mois cubain va devenir éternel ! ;-)

le mois cubain

14 juin 2011

Jorge Camacho - un hommage

J'ai lu pour la première fois le nom de Jorge Camacho en cherchant de qui pouvait bien être cette étrange et belle illustration du livre Celestino avant l'aube, de Reinaldo Arenas que j'étais en train de lire.

Reinaldo Arenas, Jorge Camacho, littérature cubaine, le mois cubain

J'ai alors découvert que Jorge Camacho était un artiste cubain et que ce n'était vraiment pas par hasard qu'il illustrait la couverture de cette réédition d'un livre de Reinaldo, et même TOUS les livres de Reinaldo Arenas réédités chez Mille et une nuits.

Jorge Camacho, surréalisme, peintre cubain, hommage

Jorge Camacho est né en 1934 à La Havane qu'il quitte en 1959 pour s'installer à Paris, où il rencontre sa femme, Margarita étudiante espagnole, et les surréalistes dont André Breton. Il se crée son style petit à petit, faisant se cotoyer d'un côté les tons pastels et les courbes et de l'autre les couleurs vives, les piquants et le feu. Il s'attache à peindre tout ce que le réel a d'énigmatique et de paradoxal. Très tôt, en 1967 lors d'un voyage à Cuba avec Margarita, il découvre le premier livre de Reinaldo Arenas (eh oui, son premier livre Celestino antes del alba est bien paru à Cuba, et plus aucun autre après!), tombe sous le charme de cette écriture étonnante, et le couple prend contact avec lui, et réalise que la Révolution n'est pas tout à fait ce que le monde semble vouloir qu'elle soit...

Jorge Camacho, surréalisme, peintre cubain, hommage

Tout de suite, une relation s'instaure, épistolaire d'abord puis très vite Jorge et Margarita feront sortir de Cuba des manuscrits de Arenas et les feront publier à l'étranger. C'est le début d'une forte et indéfectible amitié entre les Camacho et Reinaldo Arenas. Depuis 1975, Jorge et Margarita vivent entre Paris et l'Andalousie, dans cette paisible maison "Los Pasajes", où je pense a été prise cette photo qui me plaît tant car on voit Reinaldo travailler dans un environnement qu'on imagine un des plus paisaibles qu'il ait pu connaître :

Reinaldo Arenas, Jorge Camacho, littérature cubaine, le mois cubain

Pour en revenir à Jorge Camacho, vous pouvez trouver de très nombreux tableaux de lui reproduits dans un superbe livre d'art qui lui est consacré "Jorge Camacho, vue imprenable" bilingue espagnol (Confines lejanos) de Anne Tronche chez Palantines. Et voici ici une très belle vidéo où l'on voit Jorge Camacho créer un tableau, prenez 10 minutes de votre temps pour contempler une création :

Depuis plusieurs années que je m'intéresse à la culture cubaine, j'essaie d'aller quand je peux aux rencontres sur ce thème et c'est vrai que sur Paris, nous avons la chance d'avoir une certaine actualité cubaine. :)

Le 2 mars 2009, la Maison de l'Amérique Latine organisait, à l'occasion de la publication de la correspondance entre Reinaldo Arenas et les Camacho, un événement que j'annonçais sur mon blog. Cette rencontre réunissait Zoé Valdès (toujours présente et souvent à l'origine je pense, de ce genre d'événements), Margarita Camacho -Jorge déjà trop fatigué pour être présent- (grands amis donc, et légateurs testamentaires de Reinaldo Arenas), Aline Schulman la traductrice de cette correspondance, Joris Lagarde ce français parti à Cuba pour apporter un bateau à Reinaldo pour qu'il puisse s'échapper autrement que sur un vieux pneu de récup' ; Juan Abreu qui faisait le lien entre Reinaldo et ce petit français de Joris qui venait le chercher, et Olivier Amesein ce médecin français résident aux Etats-Unis et qui a soutenu et aidé Reinaldo alors qu'il n'avait plus goût à rien quand il était très malade à la fin. Pour le distraire, il a demandé à Reinaldo d'écrire deux chansons, ce qu'il a fait et Olivier Amesein les a mises en musique et chantées : Hymno (Hymne) et Una Flor en la memoria (Une Fleur dans la mémoire). Cette correspondance Reinaldo Arenas - Lettres à Margarita et Jorge Camacho (1967 - 1990) est très riche et extrêmenent émouvante. On sent vraiment que Reinaldo vit pour la littérature, qu'il est extrêmement angoissé et a peur de tout, que Jorge et Margarita Camacho sont une véritable bouée à laquelle il s'accroche pour vivre et garder espoir... On voit Reinaldo tel qu'il est dans tout son génie et sa part de folie aussi. C'est un livre à parcourir, à lire et relire...

Reinaldo Arenas, Jorge Camacho, correspondance, littérature cubaine, le mois cubain

Lors de cette rencontre, a été projeté un extrait du documentaire Seres Extravagantes (56 min) de Manuel Zayas qui présente le processus de marginalisation, de répression et de négation des homosexuels à Cuba par l'histoire de Reinaldo Arenas et avec des interventions de proches de l'auteur. Les extraits que j'ai trouvés sur Internet sont de mauvaise qualité, je vous ai donc sélectionné cette vidéo qui commence par une série de photos de Reinaldo Arenas, et qui vers 3:50 se poursuit par un extrait du film Habana de Jana Bokova où l'on voit Reinaldo s'exprimer sur son quotidien en exil mais également sur ce qu'il a vécu pendant sa persécution à Cuba :

Pour continuer un instant avec Reinaldo, un petit photo-montage de la librairie Salón del Libro (Paris 5è) qui faisait un hommage à Reinaldo Arenas, le 18 mars 2010, à l'occasion des 20 ans de sa mort, où nous étions présentes avec Cryssilda (petit clin d'oeil à toi!) et où de nombreux auteurs, journalistes, traducteurs, éditeurs, etc étaient venus pour cet hommage parisien à Reinaldo Arenas.

Et on voit ici Margarita Camacho s'exprimer au sujet de leur lien Jorge et elle avec Reinaldo Arenas (la vidéo fait un peu amateur, mais on passera sur ce point ;)


Jorge Camacho est donc décédé le 30 mars dernier à Paris à l'âge de 77 ans. Il est enterré au cimetière du Père Lachaise. Cryssilda et moi avons dédié ce mois cubain à Jorge Camacho.

Jorge Camacho, surréalisme, peintre cubain, hommage

PS : comme d'habitude en ces lieux, toute illustration appartenant à une personne qui ne serait pas d'accord pour qu'elle se trouve ici, pourra être retirée immédiatement à la demande du-dit propriétaire.